Hello! Hello!
J'ai failli passer à côté de vos posts sur le sujet. Je suis un peu moins assidu et du coup, il y a beaucoup plus de posts à lire...
Tout d'abord, je suis ravi d'avoir poussé Marc sur scène !
Alors pour ma part, j'ai d'abord relu des classiques (deux ou trois pièces de Molière, Cyrano de Bergerac mais là c'était pour le plaisir et une pièce contemporaine dont j'ai oublié le nom mais qui avait été joué par Arditi, Weber et Luccini entre autre).
J'ai noté ce qui me faisait réagir et pourquoi ça me faisait rire (parce que soyons honnête, le rire et l'absurde sont intéressants à faire jouer et très gratifiants à écrire).
Ensuite, j'ai choisi une thématique très globale - agrégat de sujets qui me tenaient vraiment à cœur (foot, mouvement ultras, religion et manipulation des masses).
J'ai écrit des répliques qui me passaient par la tête sans forcément de lien les unes avec les autres.
Puis, après un temps de décantation je me suis contraint, forcé à faire un plan. Ce qui n'a rien de facile. Entre les entrées/sorties de personnages entre les scènes, je pense que c'est même un des côtés éliminatoires. Il faut vraiment écrire tout en étant spectateur de son texte. Les acteurs doivent naturellement évoluer sur la scène.
Enfin, j'ai écrit en suivant mon plan et en insérant les dialogues qui habillaient le mieux certaines scènes (50% des répliques ont été jetées dans les poubelles de l'oubli - c'est à dire la petite bannette en haut à gauche de mon écran).
A savoir:
1/ Décor minimaliste
2/ Permettre aux acteurs de jouer avec emphase (il faut que les textes leurs permettent de surjouer certaines émotions)
3/ Trouver un final et des symboles qui touchent le plus grand nombre
4/ Attention aux indications et descriptions... pour ma part, j'en avais mis un peu trop.
ça a marché pour ce coup là, je vais bientôt passer à la phase d'écriture finale pour ma tentative de cette année. On va voir ce que ça va donner.
Pour la VAR et ses précieuses ridicules, j'ai commencé comme ceci:
Synopsis Max est un humain ancien arbitre de football tout juste sorti de stase. Un jet lag de deux siècles plus tard, il lui faut s’acclimater à son nouvel environnement. Tâche ardue si ce n’est impossible car en plus de devoir composer avec le décalage spatio-temporel qui l’affecte il doit participer à un jeu télévisé idiot : arbitres-moi si tu peux ! Arbitrer un match ne devrait pas lui poser de difficulté mais savoir que le perdant sera exécuté et que la candidate qui lui est opposée est une gynoïde en rodage tout juste sortie des chaînes de montage, corse sérieusement l’équation du problème. D’autant plus que son opposante du soir est équipée de toutes les options nécessaires pour détecter les fautes au millimètre près et qu’elle maîtrise à merveille les codes télémarketing de l’émission. Au fil du jeu la Gynoïde et Max vont apprendre à se connaître et tenter de reprendre en main leur destinée commune en utilisant les règles du jeu contre leurs concepteurs.
Les gynoïdes ont-elles une âme ? Est-ce que les IA que nous créons seront toutes vouées à dénaturer nos cadres de vie future ? Qu’en sera-t-il de nos loisirs demain ? Et la religion dans tout ça, et le foot ? Sport populaire, le football est un formidable catalyseur sociétal dans lequel toute la palette des sentiments humains s’épanouit dans un grand maelström que l’on se plait à imaginer décorrélé des enjeux financiers qui lui sont liés. Pourtant les salaires mirobolants, les stades pharaoniques, les appels d’offre des chaînes privées qui lui sont associés depuis une vingtaine d’années en font un actif financier qui ne tolère plus la moindre incertitude. La fonction arbitrale a évolué pour servir cette évolution du système. Les moyens techniques mis au service de l’arbitre sur le terrain ont été démultipliés pour permettre au spectacle de se dérouler dans l’illusion de l’équité parfaite. Autrefois complètement indépendant sur le terrain, l’arbitre se retrouve maintenant assisté et contraint par une batterie d’assistants techniques qui le dépossède de son autorité légitime. A l’apogée des années 2020, les VARs dans leur petit camion lui ont même volé la vedette puisqu’ils sont devenus l’enjeu si ce n’est une partie du spectacle eux-mêmes. Et tout le monde peut (à condition d’être abonné et de payer) se substituer à eux à force de ralentis afin de juger non pas le jeu mais le respect des règles. Exit la main de Dieu, l’expression ‘il était mille fois hors-jeu’, le joueur roublard qui ne se faisait pas prendre par la patrouille. En contrôlant à l’extrême le déroulement du jeu, on l’aseptise de tout ce qui le rendait humain et on infantilise les dépositaires des règles. Dommage d’avoir oublié que la glorieuse incertitude du sport s’était bâtie sur des injustices. Dommage aussi de ne pas se rappeler que selon la théorie universelle et connue de tous les supporteurs : à la fin du championnat les erreurs d’arbitrage finissent toujours par s’équilibrer.
Personnages :AlVARia alias La VAR, gynoïde en rodage
Max, post-humain décongelé
Monsieur Loyal, néo-humain starisé
Zyclon, bourreautomate
Cosinus, algautomate
En arrière-plan, une porte. Deux chaises blanches placées de part et d’autre d’une table derrière laquelle se tient un homme coiffé d’un haut de forme. Un bouton buzzer de couleur rouge est situé à chaque extrémité de la table face aux deux chaises. A la droite de la scène un homme se tient debout dans un caisson posé à la verticale. Il a les yeux clos et les bras tendus en avant, la paume de ses mains ouvertes. Sur la gauche de la scène, dans un caisson identique, se tient une femme les yeux clos les bras croisés la paume des mains posées à plat sur ses épaules.
Scène 1Monsieur Loyal, la VAR, Max
La lumière tombe sur l’homme au haut de forme.Monsieur Loyal : Bien l’bonjour ! Nous sommes ici ce soir pour notre rendez-vous sportif que vous attendez tous avec impatience, j’ai nommé : Arbitres-moi si tu peux ! Permettez-moi de vous présenter ce soir notre première candidate. C’est une gynoïde à peine sortie de l’usine d’assemblage de chez Biotech. Elle se présente bardée de ses précieuses options : le dernier détecteur de mouvements megawatch ainsi que son module d’arrêt sur image ultrascreen ! Son nom ? J’ai nommé : AlVARia ! Mais nous l’appellerons tout simplement : la VAR !
(Il désigne des deux mains le caisson à sa droite. Un puit de lumière tombe du plafond sur la gynoïde qui semble s’éveiller. Elle s’étire sensuellement et se dirige vers sa place.)La VAR : Quel accueil chaleureux ! Vous êtes ?
Monsieur Loyal : Monsieur Loyal pour vous servir. Venez ici je vous prie
(il lui désigne la chaise à sa droite). Installez-vous le temps que je présente notre second candidat. Il nous vient d’un temps que les moins de deux siècles ne peuvent pas connaître, d’une ère sportive primale durant laquelle les décisions arbitrales se prenaient sans aucune directive technologique assistée. Décryogénisé pour votre bon plaisir nous vous servons sur ce plateau un ancien arbitre professionnel ! Soufflera t’il le show ou le froid face à l’épreuve qui l’attend ? Je vous présente… Max !
(Il tend le bras vers le caisson à sa gauche. Un puit de lumière tombe du plafond sur l’homme qui cligne des yeux puis titube et tombe à plat ventre sur le sol.)Max : Et merde !
Monsieur Loyal : Est-ce que ça va monsieur Max ?
Max (il se relève) : Comme quelqu’un qui vient de rater son entrée.
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Lors même qu'on n'est pas le chêne ou le tilleul, ne pas monter bien haut, peut-être, mais tout seul !
Cyrano de Bergerac - Edmond Rostand