Marc S a écrit:« Mais justement, on ne se sent pas chez soi au Pays des Elfes » (au sujet du dépaysement un tant soit peu déstabilisant que provoque un bon roman de fantasy, et contre les productions plus "faciles" où l'univers imaginaire est une transposition paresseuse et artificielle de la réalité contemporaine).
J'ai lu "La Main gauche de la Nuit" il y a un mois, premier récit de Le Guin que je lisais, et j'en suis sorti bien déstabilisé, effectivement!
Pour ceux qui ne connaissent pas : un émissaire homme est envoyé sur une planète peuplée d'humains tous hermaphrodites, qui ne sont ni homme ni femme, mais les deux selon les histoires d'amour qu'ils vivent. Le Guin installe une tension entre le héros et un autre personnage sombre, subtil, ambivalent dans sa morale. La tension d'opposition devient une tension érotique (qui n'aboutit pas mais presque), et ce qui est fou c'est qu'on ressent aussi cette tension... pour un être hermaphrodite dont les deux facettes sexuelles sont constamment rappelées parce qu'elles dérangent le narrateur (humain-homme de base). J'en suis resté tout bizarre.
Le récit fait aussi la part belle à l'inceste: les frères-soeurs étant autorisés à coucher ensemble! Elle nous épargne ça, mais je trouve qu'elle a trouvé un biais très singulier pour nous confronter aux tabous. Quand j'y repense, je me dis qu'elle a voulu nous faire "subir" une expérimentation anthropologique.