Après avoir récemment lu "
Le ministère du Bonheur Suprême" d'Arundhati Roy, qui explorait en détail l'état des choses au Cachemire indien, je suis tombée en quelque sorte sur son pendant pakistanais avec le roman "
Les Lunes de Mir Ali" de
Fatima Bhutto, écrivain et journaliste appartenant à la plus grande famille politique du pays puisque sa tante était la première ministre Benazir Bhutto, assassinée dans un attentat en 2007, et que son grand-père avait été le premier Premier Ministre après la Partition de 1947.
Résumé : Mir Ali, petite ville rebelle de l'ouest du Pakistan, à la frontière avec l'Afghanistan : trois frères aux trajectoires opposées se préparent pour l'Aïd : l'aîné qui a rejeté son pays pour le rêve américain, le deuxième qui a opté pour la neutralité en devenant médecin à Mir Ali, le benjamin qui poursuit la lutte de son père pour l'indépendance du Waziristân.
Au centre de leurs vies, deux femmes. L'une, engagée dans la rébellion, est prête à tout pour défendre son combat. L'autre, épouse du médecin, a sombré après la mort de leur fils tué dans un attentat.
Au fil des heures qui s'écoulent, leurs choix, leurs erreurs et leurs sacrifices vont les rapprocher ou les séparer définitivement...
Mon avis : J'ai vraiment été étonnée par les similitudes entre la situation des gens décrits dans ce roman et celle de ceux décrits dans celui d'Arundhati Roy, hormis bien entendu la question de l'opposition religieuse Hindouisme-Islam qui n'existe pas ici, et qui montre donc à quel point dans les deux cas, cette situation est foncièrement politique. Les gens de Mir Ali ne se sentent pas Pakistanais et veulent leur indépendance pour être réunis avec les populations de leur ethnie qui se trouvent en Afghanistan (la division fut le fait des britanniques pendant la période coloniale, avec la ligne Durand si je ne me trompe pas, et ne prit donc pas en compte les intérêts des populations locales). C'est un peu la même situation avec le Cachemire divisé entre l'Azad Kashmir (pakistanais) et le Kashmir ("occupied by India").
Les deux armées, indiennes et pakistanaises sont souvent décrites de la même manière, cruelles, un danger, et qui usent de torture et font disparaître les gens. C'est assez intéressant de voir que finalement ces deux pays qui s'opposent tant ont chacun une région où ils sont vus de cette manière par ceux qu'ils considèrent comme leur population. Le militantisme est également vu par les locaux comme une recherche de liberté tandis que le gouvernement n'y voit que des terroristes (idem au Cachemire). Ceux-ci vont s'entraîner militairement en Afghanistan quand ceux du Kashmir viennent s'entraîner au Pakistan. J'ai donc trouvé le livre très instructif, mais c'est là encore une lecture assez lourde.
L'écriture est plus simple que pour le livre d'Arundhati Roy même si il y a des changements chronologiques parfois abrupts qui m'ont un peu perdue. Fatima Bhutto se concentre sur son sujet ce qui est une bonne chose. La fin cependant est trop ouverte à mon goût et manque de réelle conclusion.
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"Certaines personnes sont comme les mots écrits dans le sable, un souffle de vent suffit à les emporter."